La semaine dernière, je vous parlais des Amazones et des idées qu’elles ont inspiré aux couturiers, notamment dans les années 1980s. Aujourd’hui, on continue à aborder ce thème, via ce que les spécialistes appellent le powerdressing.
Powerdressing – le pouvoir par l’habit
Connaissez-vous cet anglicisme ?
Il s’agit d’un mot apparu dans les années 70. Composé de power (pouvoir) et de dressing (garde-robe), on le traduit souvent par « allure néo-business » en français d’après Tatiana Haen, qui a écrit l’excellent livre Powerdressing (éditions Kiwi). Il faudrait définir ce qu’est une allure business, non ?
Faire valoir ses compétences
De quoi s’agit-il ? Et bien tout simplement de la façon dont il est préférable de s’habiller pour exercer des fonctions à haute responsabilité et faire carrière. En particulier pour une femme qui doit veiller à s’habiller d’une certaine façon pour que ses compétences professionnelles ne soient pas mises en doute, et qu’elle ne soit pas moins considérée qu’un homme à niveau de compétences égales. Bien s’habiller relève presque d’une compétence professionnelle, quand il s’agit de faire une bonne impression ! L’aspect visuel prime en effet à 55% lors d’un première rencontre physique !
Maîtriser son image pour favoriser sa réussite, c’est un programme toujours d’actualité !
J’en parle assez peu dans la vidéo IGTV que j’ai publié au sujet des Amazones, mais vous l’aurez compris, il est bien question d’égalité de pouvoir entre l’homme et la femme dans les deux cas.
Origines du Powerdressing
Comme je vous l’ai raconté quand je vous parlais des Amazones et de leur influence sur la mode, le powerdressing est né dans les années 80s, les années « Wall Street« , c’est-à-dire les années où la bourse et la finance étaient sur-valorisées, ce qui a influencé le vestiaire masculin et féminin.
Pour les hommes, le mot d’ordre est costume, voire trois pièces. Pour les femmes, il y en a deux : active et sexy. Elles font valoir leur ambition s’imposent dans les conseils d’administration, optent pour des vêtements qui disent leur appétit de réussite et rassurent leurs homologues masculins sur leurs compétences.
La silhouette-clé : tailleur structuré
La tenue-clé de cette décennie est incontestablement le tailleur, très épaulé, et très étroit à la taille, porté avec une mini-jupe.
En termes de motif, on affirme la puissance (tiens ? vous avez dit power ?) avec des motifs de chaîne, ou … animaliers ! C’est le grand retour du léopard. Je dis retour, car Christian Dior avait en 1947 donné ses lettres de noblesse à cet imprimé controversé car souvent associé à une faible qualité.
« Qui voudrait vivre dans un monde sans léopard ?»
Diana Vreeland,
mythique éditrice mode de Vogue – elle a inspiré le personnage de Méryl Streep
dans Le Diable s’habille en Prada
En y réfléchissant, ce n’est pas un hasard si le léopard renvoie à la puissance et soit donc particulièrement apprécié à cette époque. Les pharaons de l’Egypte ancienne déjà reconnaissaient à cet animal sa férocité. La déesse de la sagesse porte d’ailleurs une peau de léopard… Le savoir comme signe de supériorité.
Dans certaines cultures africaines, c’est lui, le roi des animaux !
Power dressing, couleurs et accessoires
Les accessoires ne sont pas en reste, et montrent la réussite : sac matelassé Chanel, carré Hermès, mocassins Gucci, Rolex au poignet, agenda Filofax, talons aiguille signé Manolo Blahnik.
Côté couleurs, ne vous trompez pas ! Il ne s’agit pas du tout de faire l’éloge du noir, qui ne met en valeur que peu de teints. Au contraire, le powerdressing met l’accent sur des neutres : beiges, crèmes, gris, roses, marrons, et bien sûr bleu marine, et des presque-neutres comme les appelle Tatiana Haen : rouge bourgogne, vert anglais, bleu cobalt, marron terre de sienne.
Chaque couleur ayant une symbolique forte, elles doivent être utilisées à bon escient : couleurs riches pour montrer son influence, verts pour rassurer, oranges et violets pour inspirer, bleus pour inspirer la confiance ou gris pour l’autorité, etc.
Les créateurs phare du power-dressing
Bien sûr, il est indispensable que je vous donne quelques noms de créateurs qui ont particulièrement incarné cette période.
Sans surprise, il y a bien sûr des créateurs américains, à commencer par Donna Karan, qui choisit de s’adresser à la femme active de l’époque, « yuppie », celle qui a beaucoup d’argent, un appétit pour le luxe et peu de temps. Elle invente un vestiaire minimal avec sept pièces essentielles à mixer très facilement quelle que soit la circonstance. Dans une publicité, elle montre même une femme présidente des Etats-Unis !
Bien vu de se concentrer sur cette femme en particulier ! J’en veux pour preuve le choix similaire d’Anna Wintour quand elle est nommée rédactrice en chef du Vogue anglais en 1985.
Il y a aussi Giorgio Armani, qui comprend les femmes des années 80s et leur offre une garde-robe un peu plus décontractée, adaptée à leurs envies et à leur style de vie, dans des matières luxueuses. L’offre pour hommes est aussi une réussite. La marque profite du succès du film American Gigolo, dans lequel l’acteur principal Richard Gere représente avec charme le style Armani.
Power Dressing pour les hommes
Impossible aussi de ne pas mentionner Hugo Boss et Paul Smith pour la mode homme.
Hugo Boss s’est spécialisé dans les vêtements de travail dès les années 1920s. Sa renommée en matière de costume devient internationale dans les années 1980s.
Paul Smith mise davantage sur l’humour, qui le caractérise toujours d’ailleurs, en proposant des costumes impeccablement coupés. Le petit plus du créateur ? Proposer des couleurs et des textures extravagantes. So British !
Aujourd’hui le power dressing a evolué avec la mode, les épaulettes ont par exemple disparu pour revenir, moins marquées, la mini aussi, avec l’arrivée du short notamment. Mais il est toujours de mise, car le style « business » est un style intemporel qui permet de mettre au diapason son ambition et son vestiaire.