Vous en avez maintenant l’habitude ! Je vous propose régulièrement des anecdotes sur l’histoire de la mode et du luxe dans mon podcast baptisé Trésors du Luxe sur Spotify !
Aujourd’hui j’aimerais vous parler d’une robe en velours de soie extraordinaire qui appartenait à la Comtesse de Greffühle.
La Comtesse de Greffühle, muse et amie des artistes du Paris Belle-Epoque
La Comtesse de Greffühle, je vous en ai déjà parlé, lors de l’épisode consacré à la visite en cachemire du Palais Galliera. Née Elisabeth de Riquet de Caraman en 1860, fille d’un prince, cette élégante dame a vécu pendant près d’un siècle, pendant lequel elle a marqué la haute-société parisienne par ses goûts et son intelligence. Amie et défenseuse des artistes, elle a par exemple inspiré à Proust sa Duchesse Oriane de Guermantes, et le compositeur Gabriel Fauré lui a dédié sa Pavane opus 50, qui serait en quelque sorte son portrait musical.
Revenons maintenant à cette magnifique robe brodée de lis blancs. Elle est exceptionnelle par l’aura de son illustre propriétaire comme vous l’avez compris. Elle l’est aussi pour les vers poétiques que le dandy et poète Robert de Montesquiou déclame pour lui rendre hommage en voyant sa cousine la Comtesse dans cette robe :
«Comme un beau lys d’argent aux yeux de pistils noirs Ainsi vous fleurissez profonde et liliale et tout autour de vous, la troupe filiale des fleurettes s’incline ».
Flattée, Elisabeth choisit le lys comme emblème à compter de ce sonnet.
Une robe qui souligne la finesse de la taille
Regardez comme cette robe haute-couture est aussi extraordinaire par sa coupe, une originalité pour l’époque. Nous sommes en 1896, les dames portent habituellement des robes en deux parties qui dessinent la silhouette en « S », avec un corset baleiné et un faux-cul, ainsi que nous l’avons abordé dans l’épisode #4.
Pour cette robe toutefois, Charles-Frédéric Worth a troqué la coupe habituelle pour mettre en valeur la morphologie de la Comtesse et souligner la finesse de sa taille, probablement à sa demande, car la Comtesse était très sûre d’elle et de son pouvoir de séduction.
La robe présente donc une coupe dite « princesse », ajustée au buste et sans couture à la taille. Observez les broderies réalisées pour orner la robe. Elles partent du dos et descendent gracieusement jusqu’à l’extrémité de la traîne. Celle-ci contribue elle aussi à élancer la silhouette d’Elisabeth. La Comtesse de Greffühle avait conscience de ses atouts et n’hésitait pas à les mettre en valeur.
Focus sur le grand col amovible
Enfin dernière particularité, attardez-vous sur le grand col de cette robe. On l’appelle aussi berthe. Il s’agit d’une garniture de robe, posée sur le décolleté ou le corsage, qui couvre les épaules et la poitrine. Les berthes sont généralement des dentelles, ici elles viennent de Calais. Innovation : elle peut être modifiée pour prendre la forme d’ailes de chauve-souris, l’animal fétiche de Robert de Montesquiou.
Une robe immortalisée par Paul Nadar en 1896
Madame de Greffühle est une amie des artistes, du photographe Nadar en particulier, avec qui elle prend même des leçons de photographie.
C’est lui qui fera le portrait qui immortalise cette robe somptueuse (ci-dessus).
Une robe de la collection du Palais Galliera, à Paris
Grâce à un don de la famille de Mme de Greffühle, cette robe unique appartient aujourd’hui à la collection du Palais Galliera, musée de la mode de Paris, ainsi qu’une série de photos réalisées par le photographe Nadar, montrant la Comtesse portant sa robe signature.
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Je vous dis à très bientôt dans Trésors du Luxe pour un nouvel objet merveilleux qui raconte l’histoire du luxe !